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Méli-Melo Belfort
12 novembre 2023

Impressions d'un touriste en visite à Belfort en 1862.

    En parcourant au hasard le Journal de Belfort et du Haut-Rhin, je suis tombé sur l'exemplaire du 10 mai 1862. On y parle d'un article de l’Illustration, où un touriste donne ses impressions sur sa visite dans la ville de Belfort. J'ai retrouvé l'édition de l'Illustration, journal universel, concernée, il s'agit de celle du 26 avril 1862. C'est un certain X. FEYRNET, qui a écrit l'article, il s'avère que ce Xavier FEYRNET est un pseudonyme d'Albert Kaempfen, journaliste, entre autres à l’Illustration. A noter qu'il utilise également, d'après wikipedia, le pseudonyme de Henrys, personnage qui apparaît également dans le récit de ce voyage à Belfort. Ce qui laisse supposer un dédoublement de personnalité qui a pour but de rendre l'article plus vivant. Je copie ci-dessous l'article paru dans le Journal de Belfort auquel j'ai ajouté les parties manquantes retrouvées dans l'Illustration, qui consistent en une partie introductive au voyage à Belfort, et une partie finale qui relate la visite faite à Mulhouse après celle de Belfort. Pour les distinguer, je les ai colorées en bleu :

    L'Illustration a publié les impressions qu'un touriste, homme d'esprit paraît-il, a éprouvées en visitant la ville de Belfort. Nous reproduisons les jugements qu'il porte sur notre cité persuadé que la peinture qu'il en fait ne sera pas lue avec déplaisir par les personnes qui connaissent Belfort et les habitudes de ceux qui l'habitent.

    Voyager en été ou en automne, quand tout le monde voyage, le beau mérite ! mais courir la montagne ou la plaine, lorsque soufflent les dernières bises de l'hiver, lorsque le soleil n'a que d'inconstantes caresses, lorsque que le ciel le plus pur garde toujours quelque arrière-pensée de pluie, de grêle et de giboulées, à la bonne heure ! L’heure n'a point sonné des grandes migrations des peuples étrangers : les Russes chassent encore l'ours et le loup dans leurs forêts éblouissantes de givre ;

Une chasse à l'ours en Russie, la chasse illustrée
Une chasse à l'ours en Russie. La chasse illustrée, 3 janvier 1874. gallica.bnf.fr.

les bons Allemands sommeillent à côté de leurs énormes poëles qui ronflent avec eux dans un touchant accord ; les Anglais de toutes formes, de toutes dimensions, de toutes professions et de toute humeur ne songeront pas de sitôt à bourrer, de toutes sortes de petits meubles ingénieux, leurs havresacs modèles, à remplir leur malles aux innombrables compartiments, et à commander à leurs tailleurs ces paletots à douze poches qui font l'admiration du continent ; les jeunes miss intrépides et leurs longues tantes sèches et couperosées prennent encore du thé at home, et de quelque temps ne s'abattront pas sur le monde.
    C'est le moment de partir ! On a quelque chance de voir ce que le premier venu ne verra pas, et s'il vous prend fantaisie d'écrire des impressions de voyage, il y a beaucoup à parier qu'on n'aura pas de concurrence fâcheuse à redouter.
    Voilà pourquoi mon confrère Henrys et moi sommes montés, par une matinée fort grise et fort aigre, dans un wagon qui s'en allait, en compagnie de plusieurs autres, vers la frontière de l'Est. — Nous avions d'ailleurs quelques visites à rendre à Belfort.
    J'espère que mes lecteurs, — on aime toujours à croire qu’on a des lecteurs, — me pardonneront d'avoir fait faux bond à Longchamp : si quelque événement vraiment mémorable marquait ces classiques journées de la mode, je le saurais certainement à mon retour et je ne manquerais pas de les en informer.

    Nous arrivâmes à Belfort le soir par un petit froid qui n'aurait pas fait honte à un mois de janvier rigoureux. Le lendemain, à notre réveil, les arbres, les toits, les pavés, tout était d'un blanc superbe ; le ciel seul était noir : il avait neigé toute la nuit. Dans les dispositions où nous avions quitté Paris, c'était bien le cas d'entreprendre l'ascension du ballon de Giromagny ; mais l'homme est rempli de contradictions, et nous restâmes à nous chauffer les pieds devant un grand feu, comme si Giromagny et son ballon n'avaient jamais existé.

N.D.L.R. : Jadis appelé ballon de Lorraine ou de St-Maurice par les habitants de Giromagny, et ballon de Giromagny par les lorrains, il a pris le nom définitif actuel de ballon d'Alsace, alors que ce terme n'avait jamais été employé jusqu'alors. Cela est dû à l'état major de l'armée qui en créant leur carte de la région ont harmonisé tous ces termes en un seul, celui d'Alsace. A noter que celui-ci a parfois été également dénommé Grand Ballon, terme employé maintenant pour l'ex-ballon de Guebwiller ! D'où la confusion qui règne encore à l'heure actuelle chez certains journalistes parlant des sommets des Vosges.

    Quand nous eûmes bien chaud, nous allâmes visiter la ville ; nous logions dans un faubourg, et ce ne fut pas sans quelque difficulté que nous la trouvâmes, tant elle se cache bien, non par un sentiment de pruderie exagérée, mais par l'effet d'une crainte raisonnée des Prussiens, des Autrichiens, des Russes et, en général, des gens qui demeurent de l'autre côté du Rhin. Sans les deux tours de son église, bien fin celui qui la découvrirait.
     Cette église, en pierre rouge d'Alsace, lourde, robuste, trapue, construite dans le goût du dix-septième siècle, assez ornée, mais dépourvue d'élégance, un hôtel de la sous-préfecture, un palais de justice d'honnête apparence, un collège, un hôpital, deux places, dont l'une est ornée de trois ormes, l'autre de vingt-deux tilleuls, soigneusement taillés, huit ou dix rues sur lesquelles s'ouvrent des boutiques dont quelques-unes ont très-bon air, le tout enfermé dans d’immenses casernes entourées elles-mêmes de deux murs et de deux fossés d'enceinte : voilà Belfort.

Belfort - Eglise St-Christophe
Belfort - Eglise St-Christophe.
Géographie pittoresque et monumentale de la France
, 1900, gallica.bnf.fr.

    Il y a, dans l'église, un Saint-François-Xavier en extase et une Mise au tombeau qui méritent d'être vus : ce sont deux ouvrages d'un peintre belfortain, Gustave Dauphin, mort jeune encore, et dont ses compatriotes avaient sujet d'être fiers.
    La salle d'audience du tribunal est entièrement revêtue de boiseries blanches ; des colonnes engagées dans le mur affectent de soutenir le plafond, mais je me trompe fort, ou elles ne sont là que pour le coup d'œil. Mon confrère Henrys, qui se dit bon juge en fait d'architecture judiciaire, sans doute sous prétexte qu'il rédige la Gazette du palais, affirme que cette salle est très-majestueuse ; je ne suis pas éloigné d'être de son avis. Ses informations particulières lui ont permis de m'apprendre que les avocats de la ville étaient des hommes fort habiles, maniant joliment la parole, et qu'il n'y avait, en France, que neuf tribunaux d'arrondissement qui eussent à juger plus de procès criminels que le tribunal de Belfort ; ce dernier point est bien fait pour exciter la jalousie des trois cent soixante et un arrondissement de l'empire qui sont moins favorisés sous ce rapport.
    Hors des murs s'élèvent la synagogue et le temple protestant : la synagogue est un fort joli petit édifice d'une gracieuse architecture ; on ne parlerait guère du temple s'il n'avait été bâti sur les dessins de Kléber, qui, avant de devenir le grand général que vous savez, était architecte à Belfort.

Belfort - La synagogue
Belfort - La synagogue. AD du Territoire de Belfort.

    La ville est dominée par trois forts : le Château, qui est la citadelle proprement dite, la Justice et la Miotte. Le Château est à moitié construit dans le roc ; de prodigieux ouvrages où Vauban a dépensé toutes les ressources de son génie en défendent les approches : c'est un réseau de chemins couverts, de tranchés, de couloirs qui montent, qui descendent, qui se croisent, à épouvanter Dédale et à ravir d'admiration les officiers du génie. Quel dommage d'être un bourgeois étranger aux premiers éléments de l'art de la fortification et de ne pouvoir élever son intelligence à la hauteur de tant de belles choses ! Du moins, à l'aspect des escaliers brusquement coupés, des dames énormes à cheval sur les batardeaux, des plates-formes qui finissent brusquement en précipice, des pelouses mollement gazonnées qui vous mènent, sans qu'on s'en doute, sous un triple rang de meurtrières et d'embrasures de canons, j'ai pu comprendre quelles aimables surprises étaient réservées aux assaillants qui parviendraient à franchir la première enceinte. Décidément il ne doit pas être agréable d'être chargé de prendre Belfort.
    En se serrant un peu tous les habitants de la ville trouveraient place dans les souterrains, qui sont vastes, biens aérés et garnis de cheminées de la plus belle taille. Je ne crois pas qu'on puisse imaginer des souterrains plus confortables,
    Le fort de la Miotte m'a paru le plus joli fort du monde : de l'esplanade on a, sur les prairies, semées de jolis villages, sur un charmant étang entouré d'un petit bois et sur la chaîne des Vosges, une vue ravissante.

Belfort - Tour de la Miotte et étang des Forges
Belfort - La tour de la Miotte et l'étang des Forges. AD du Territoire de Belfort.

    Une mignonne rivière, qui coule entre la ville et les faubourgs, s'appelle la Savoureuse ; un des faubourgs s'appelle le faubourg des Ancêtres, il conduit au cimetière ; dites après cela que les Belfortains n’ont pas l’imagination poétique.
    Ils ont aussi beaucoup d'esprit.
    Je n'en veux citer qu'une preuve.
    Un règlement militaire interdit aux habitants dont les jardins sont compris dans une certaine zone autour de l'enceinte fortifiée, d'y élever des constructions, à moins d'une autorisation qu'on n'obtient qu'en se soumettant à de longues et nombreuses formalités ; mais les kiosques, les pavillons et les gloriettes montés sur roulettes sont tolérés. En cas d'alarme soudaine, on les emmènerait hors de la portée du canon des forts, et les opérations de défense ne seraient point gênées. Les Belfortains ont trouvé un moyen fort ingénieux de satisfaire en apparence aux exigences du génie, sans qu’il leur en coûte le sacrifice d'aucun des droits ordinaires attachés à la propriété : ils bâtissent dans leurs jardins de vraies maisons adhérentes au sol, comme le seraient des maisons de ville, seulement ils leur attachent des roulettes aux quatre coins ; quelquefois même, lorsqu'une seule des faces de la construction est visible, ils économisent deux roulettes sur quatre.
    Le génie, trouvant la chose plaisante, fait semblant de ne pas s'en apercevoir, et tout est pour le mieux : la lettre du règlement est respectée, n'est-ce pas déjà beaucoup ?
    La semaine dernière, la grande préoccupation de Belfort était le procès intenté par un cafetier de la ville aux commissaires du bal par souscription donné cet hiver.
    On avait laissé ce cafetier mettre son nom sur la liste de souscription, puis on lui avait signifié qu'il n'entrerait pas au bal.
    Le brave homme se trouva fort offensé : c'était, disait-il, une insulte publique qu'il ne pouvait se résigner à subir : la mesure dont il avait été l'objet portait atteinte à sa considération et à son honneur, et il protestait hautement contre une déclaration d'indignité qui le flétrissait injustement assigna devant le tribunal les organisateurs de la fête : en l'acceptant au nombre des souscripteurs, on s'était engagé à l'admettre au bal ; il y avait un contrat formé et ce contrat avait été violé à son préjudice : dès lors des dommages-intérêts lui étaient dus.
    Son avocat plaida très-habilement et rappela avec beaucoup d'éloquence les principes éternels de 89 qui consacrent l'égalité de tous les citoyens entre eux.
    Le tribunal donna gain de cause au cafetier en se bornant à condamner les commissaires du bal aux dépenses pour tous dommages-intérêts. C'était pour le digne cafetier une question de dignité, non une question d’argent : il est content, je suppose.
    L'événement de ces jours-ci est l'arrivée de deux cigognes. « Avez-vous vu les deux cigognes ? » Telle est la question avec laquelle on s'aborde sur la place d'Armes. Le matin les officiers du 86e de ligne et les officiers de dragons qui se promènent devant l'église, grelottant dans leur caban ou dans leur spencer fourré d'astrakan, cherchent, en s'aiguisant la moustache, les deux cigognes dans le ciel gris.
    Rarement les cigognes, ces oiseaux sacrés de l'Alsace, daignent venir se loger à Belfort ; on ne se souvient pas d'en avoir vu depuis dix ou douze ans.
    « Allons, il fera chaud cet été, » disent les Belfortains en se frottant les mains et en saluant amicalement de la tête leurs hôtes qui planent au-dessus du panier rempli de provisions qu'une main généreuse a placé, à leur intention, sur une des tours de Saint-Christophe.
    En attendant qu'il fasse chaud, la neige tombe toujours, il souffle du nord de furieuses bouffées d'un vent glacial ; c'est ce qu'on appelle dans le pays le coup de balai de Giromagny.
    « Vous plairait-il d'aller faire un tour dans la montagne ? — ai-je demandé hier matin à mon confrère Henrys, — Belfort n'a plus de secrets pour nous.
    — Je crois, m'a-t-il répondu fort sérieusement, qu'il vaudrait mieux aller d'abord à Mulhouse, — on assure que c'est une fort belle ville.
    — Va pour Mulhouse !
    — Pensez-vous qu'il y ait des boules d'eau chaude dans les wagons ?
    — Je l'espère. »
    Il y avait des boules d'eau chaude : nous sommes partis pour Mulhouse ; une heure plus tard nous traversions le pont des Bonnes Gens : il neigeait toujours.
    Mulhouse est la capitale de la toile peinte : les noms de Schmalzer, de Dollfus, de Kœchlin, y sont plus célèbres que ceux de Montmorency, de Condé et de Rohan ; les armées qu'on y voit sont des armées d'ouvriers, et les grandes cheminées des manufactures y remplacent les colonnes triomphales et les obélisques.

    N'allez pas vous figurer cependant que ce soit une ville noire, sale et d'un aspect triste, où l'on respire cette mélancolie que l'on pourrait appeler la mélancolie industrielle ! Comme à Lille, Manchester ou Birmingham, le vent qui vient des Vosges se charge de nettoyer le ciel, de purifier l'atmosphère et d’empêcher la fumée du charbon du bois d'encrasser les édifices.
    Une ville nouvelle a surgi de terre comme par enchantement dans ces dernières années : il y a un quartier qui s'est donné le nom de Petit-Paris. Les rues de Magenta et d'Altkirch ne seraient pas déplacées aux alentours des Champs-Élysées ou dans le West-End que M. Péreire est en train de construire. Presque toutes les maisons, d'une architecture simple et très-élégante en même temps, s'élèvent au milieu de jardins dont les grilles font face à la chaussée et permettent à l'œil des passants de glisser sous les ombrages des arbres exotiques et sur le gazon des pelouses. C'est dans ces opulentes demeures qu'habitent les princes de l'indienne et qu'ils se reposent parmi les fleurs et au milieu de tout le luxe que peuvent donner des fortunes colossales, du sifflement de la vapeur, du bruit des machines à filer et à tisser, du mouvement perpétuel des cylindres, des broches et des dévidoirs. Les rues de Magenta et d'Altkirch sont à proprement parler un faubourg Saint-Germain manufacturier.
    A côté des splendeurs qu'on peut envier aux riches, il y a les magnificences qui appartiennent à tout le monde : j'ai été surtout frappé des arcades de la grande rue qui mène du canal de jonction entre le Rhin et le Rhône au vieux Mulhouse. Ah ! les superbes arcades ! elles sont d'une hauteur prodigieuse ; les nôtres passeraient dessous aussi aisément que des nains sous une porte cochère ; il est évident que les Mulhousiens ont eu l'intention d'humilier la rue de Rivoli.
    Ils ont commencé par embellir leur ville, vous verrez qu'ils ne s'arrêteront pas de sitôt, Voici qu'ils viennent d'achever une église catholique dans le style du moyen âge, et, sans prendre un moment de repos, ils se mettent à bâtir, dans le même style, un temple protestant pour lequel ils se piqueront de ne pas dépenser un sou de moins en matière première et en main-d'œuvre. En passant je me permettrai d'adresser un petit reproche aux ornements de l'église, ils sont un peu négligés : on travaillait mieux autrefois, avant que le tissage et la filature à la mécanique ne fussent inventés ; le temps de la sculpture et de l'architecture utilitaires n'était pas encore arrivé.
    Nous nous imaginons volontiers, nous autres Parisiens, que l’expropriation n’est faite que pour nous ; renoncez à cette illusion : la province éprouve aussi son heureux pouvoir, et Mulhouse a part à ses faveurs. C'est elle qui abat ces hôtels presque tout neufs encore ; l'année prochaine une rue passera sur le terrain déblayé ; déjà des ouvriers lui frayent sa voie et jettent une voûte sur un canal pour qu'elle n'ait point à se détourner de son chemin.
    La pioche, la scie, le marteau, le ciseau et la truelle s'en donnent à cœur joie.
    Cependant la vieille ville se fond pour ainsi dire dans la nouvelle ; les vieux monuments deviennent rares ; il n'y a guère que la tour du beffroi et l'hôtel de ville qui soient d'âge à se souvenir de la visite de Montaigne, lequel a pris un plaisir infini à voir « la liberté et bonne police de cette nation, et son hôte du Raisin revenir du conseil, où il avait présidé, pour servir ses hôtes à table » ; seuls ces deux monuments pourraient causer entre eux de l'ancienne alliance avec les cantons suisses, des bons combats que les Mulhousiens livrèrent avec leurs amis de Soleure, de Berne et de Fribourg, et de l'entrée de Turenne qui, après avoir défait les Impériaux, assura la république de l'amitié protectrice de la France ; seuls ils ont vu passer à leur pied, aux jours de grandes fêtes, la corporation des tailleurs, dont faisaient partie les apothicaires et les perruquiers ; celle des vignerons, qui comprenait les lettrés, les maîtres d'école et les ecclésiastiques ; celle des laboureurs et des bouchers , celle des forgerons, avec lesquels marchaient les charpentiers et les peintres, et celle des boulangers, dont les cordiers et les barbiers suivaient la bannière.

Hôtel de Ville de Mulhouse, Schoenhaupt Louis
Hôtel de Ville de Mulhouse, Schoenhaupt Louis. gallica.bnf.fr - Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg.

    L'hôtel de ville est un édifice en pierre rouge à toit de tuiles jaunes et vertes, et couvert de figures peintes à fresque comme l'hôtel de ville de Bâle : il est beaucoup plus petit d'ailleurs et bien moins curieux ; un escalier extérieur conduit aux appartements. Sur une des faces latérales on voit pendue par une chaîne de fer une tête en bois tirant la langue.
    « Savez-vous ce que c'est que cela, me demanda Henrys d'un air capable ?
    — Ma foi non, peut-être la breloque qu'un géant d'Alsace accrochait à son gilet.
    — C'est un instrument de supplice.
    — Ah bah !
    — C'est comme je vous le dis. On suspendait autrefois cette chaîne avec la tête qu'elle supporte au cou des calomniateurs.
    — Vous me l'affirmez ?
    — Je vous l'affirme.
    — Fort bien, la relique est précieuse. »
    Dans la vieille ville, nous avons remarqué quelques enseignes en saillie sur la voie publique, suivant la mode allemande.
    Je croyais le barbier-chirurgien disparu de France : il existe encore à Mulhouse.
    Un grand nombre de boutiques étaient fermées : c'étaient des boutiques de marchands israélites ; on célébrait la pâque juive. Les israélites font aux chrétiens, avec lesquels ils sont en relations d'amitié, la galanterie le leur envoyer du pain azyme ; si la politesse exige qu'on trouve bon ce mets frugal, il y a quelque mérite à être poli.

X. FEYRNET.

    A propos de la tête en bois tirant la langue, il s'agit de la Klapperstein ou pierre des bavards.

Pierre des bavards Mulhouse
Klapperstein ou pierre des Bavards. B. Hartmann. Mulhouse.

    le texte en allemand dit ceci : "Zum Klapperstein bin ich gennant, Den bößen Mäulern wohl bekannt, Wer Lust zu Zank und Hader hat, Der muß mich tragen durch die Stadt.

    Cela se traduit par : "Je suis nommée la « pierre des bavards », Bien connue des mauvaises langues ; Quiconque prendra plaisir à la dispute et à la querelle, Me portera à travers la ville."

    L'originale, vu par le touriste et certainement peinte sur l"illustration ci-dessus, se trouve maintenant au musée historique de la ville de Mulhouse. Une reproduction a été mise en lieu et place de l'originale.

Mulhouse - klapperstein ou pierre des bavards
Reproduction de la Klapperstein ou pierre des Bavards.
Source : madeinalsace.com.

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