Notre Petite Patrie - Histoire de la commune de Fontaine.

   Après Foussemagne, voici un deuxième historique de commune, avec Fontaine, commune limitrophe de la première. Article paru dans le journal Le républicain de Belfort du 29 avril 1931.

FONTAINE

    On trouve, vers 1098, dans un document : Henricus presbyter de Fontanis (Henri, prêtre de Fontaine). Ce nom. Fontaine a une origine qui s'explique toute seule. Fontaine a toujours fait partie du point de vue ecclésiastique de la seigneurie de Montreux : il n'en fut pas de même du point de vue civil.
    Pour l’histoire de ce village, nous ne pouvons pas prendre un meilleur guide que celui de l'étude, bourrée de documents, faite par M. l'abbé Béhr, sur les Trois Montreux.
    Fontaine étant près de la limite des deux langues et ayant eu des souverains dont les écrits officiels étaient en allemand, nous trouvons les noms : Funtain en 1344, Burnen 1351, Burne 1478, Born, Brun, 1620, Brunnen : la forme Burne se rencontre encore au XVII^e siècle.
    Liblin dit que Fontaine a toujours fait partie du fief de Montreux. C'est une inexactitude, comme nous le montre M. Béhra.
    M. Pajot, dans ses études étymologiques dit que le village de Fontaine a été détaché de la paroisse de Montreux-Jeune de bonne heure, parce qu’on voit en 1098 un « prêtre de Fontaine ». M. Béhra fait remonter l’origine de la paroisse de Fontaine avant l'an mille et dit qu’elle pourrait être du VIII^e siècle, vers l'époque de celle de Montreux-Jeune.
    M. Béhra dit aussi que Fontaine était probablement, avant 1352, une des filiales du rectorat de Montreux-Jeune. Du point de vue civil, après avoir fait partie de la seigneurie de Montreux au moyen-âge, d’en détacha par la suite pour y revenir au XVIII^e siècle.
    Son histoire politique se confond avec celle de la seigneurie de Montreux.
    En 1319, les frères d’Adélaïde de Montreux engagent Fontaine à Werner de Hattstatt, leur beau-frère.
    En 1344 « Henri, de la vallée de Fontaine renonce à toutes ses prétentions en faveur de l’épouse d’Albert » (d’Autriche). On ignore qui fut cet Henri. L’épouse d’Albert était Jeanne de Ferrette, fille de Jeanne de Montbéliard et d’Ulrich de Ferrette.

Portrait de Jeanne de Ferrette. Johanna Gräfin von Pfirdt/Alberti von Oesterreich Gmablin (1324-1353).

    En 1394, les nobles de Montreux l'engagent à Ulrilch d’Angeot.
    Après cette date, les documents certains font défaut. De 1394 à 1475, on ne possède aucun renseignement. On présume, d’après l'état des fiefs, que Fontaine aurait été possédé par Jean de Montreux-le-Jeune, puis, tombé en commise, aurais été conféré en 1475 à Jean de Kuttina, et après sa mort sans enfants mâles, aurait été donné à Oswald von Hausen, et celui-ci l'aurait remis à Gaspard de Morimont et Conrad Sturtzel. De nouveau les renseignements manquent jusqu’en 1580. Cependant Fontaine semble avoir fait partie du fief d'Antoine de Montreux en 1478.
    En 1580. Fontaine passe à Jean-Jacques de Morimont, baron de Belfort, qui en est investi en son nom et au nom de ses frères Henry et Pierre, et de Jean-Frédéric, leur cousin. Ils reçoivent le village avec la haute et basse justice, les droits judiciaires (imposition des amendes et droit de vie et de mort) et des droits de toutes sortes dont l’énumération serait longue.
    Le 19 novembre 1626, Jérôme de Morimont vend le fief à Ernest Fugger pour 36.000 florins. Il n'est mis définitivement en possession que le 5 février 1629, et il est investi par l'archiduc Léopold, le 3 avril 1630.
    Le 31 décembre 1689, Fontaine, qui est français depuis 1648, est confisqué au profit du roi et, le 28 décembre 1717, l’investiture en est conférée à François-Joseph de Reinach, baron de Foussemagne qui acquit le fief de Rodolphe Fesch, de Bâle, pour 18.158 livres. A partir de ce moment, Fontaine fait de nouveau partie de la seigneurie de Foussemagne.
    En 1439, les écorcheurs qui avaient envahi l’Alsace, séjournèrent dans la région d’Altkirch, Dannemarie, Fontaine, puis ils se dirigèrent vers Montbéliard. On les revit en 1444 lorsque le Dauphin (le futur Louis XI) les mena vers Bâle.
    Lorsqu’en 1475, les habitants du Sundgau se soulevèrent contre le gouverneur que leur avait donné Charles le Téméraire. Antoine de Montreux prit le parti de Pierre de Hagenbach, son beau-frère, et c’est ce motif qui lui fit perdre le fief de Fontaine.
    Fontaine eut sans doute à subir les rudes conditions imposées à la seigneurie de Montreux après la défaite de l’insurrection des paysans du Sundgau, en 1525.
    Pendant la guerre des Suédois, toute la région eut cruellement à souffrir et en 1633, en février, les paysans étaient soulevés et massacrait des garnisons suédoises à Ferrette et Altkirch. Mais la répression par le Rhingrave Otto fut terrible.
    En juin 1718, Louis XV avait érigé en comté les terres et seigneuries de Foussemagne et Fontaine, en faveur de François-Joseph-Ignace de Reinach, le père de Mme de Staal de Cravanche dont l’habitation à Belfort fut achetée par la ville et sert aujourd’hui d’Hôtel de Ville de Belfort.
    Sous le régime français, avant 1751, Fontaine faisait partie du baillage de Delle. A partir de cette date, il fut réuni au baillage de Belfort.
    Contrairement à l'affirmation de Liblin, Fontaine ne fit pas partie des domaines des Mazarins.
    L’église de Fontaine était du doyenné de Masevaux, du diocèse de Bâle. Elle fut du diocèse de Besançon à partir de 1782.
    Il y avait en 1790, 229 habitants, en 1803 273, en 1876, 359 et en 1926, 330.

P. GUYON.

L'ancienne poste (à gauche), le Tilleul de Turenne et l'église de Fontaine (90).